[Thierry Guidet, « Une géographie rêveuse de Nantes », Place publique, n° 64, sept. 2017] « “Dans cette ville, le passé ne cesse de colorer le présent.” Cela, on pourrait le dire de bien d'autres lieux que Nantes. Mais Marie-Hélène Prouteau convainc quand elle nous prend par la main pour nous guider et nous égarer tout à la fois dans les dédales de la ville, celle d'hier et celle d'aujourd'hui, celle bâtie de pierres et celle peuplée de songes. Ces « suites nantaises » sont constituées de textes indépendants [où] s'y télescopent le violoniste de rue roumain et le vielleur de Georges de La Tour conservé au musée, la foule du tramway et les passagers en partance pour le vapeur de Loire, les Anneaux de Buren et le fantôme de Turner. “Ne vivent-ils pas en nous, ces gens emplis de souffles ou de larmes qui se sont affairés ici ?” Qu'ils peignent Trentemoult ou le bac sur le fleuve, qu'ils campent Ricœur au temple protestant ou Derrida lors d'une manifestation de sans-papiers, qu'elles évoquent Libertaire Rutigliano déporté à Dachau, Cocteau aux Floralies, Chaillou, sa crinière blanche et ses souvenirs d'enfant, ces miniatures sont autant d’invites à l'errance dans la ville familière. Au tant de promesses que “les rêves prendront leur revanche”. Cet anti-manuel de géographie rêveuse a sa place dans toute bonne bibliothèque nantaise mais, mieux encore, dans la poche du passant pour accompagner sa dérive au fil des rues et des siècles. » |